Le remboursement de l'immunothérapie pour le cancer du sein triple-négatif redonne espoir aux patientes sévèrement touchées
9 Novembre 2021 - Grande nouvelle dans le domaine de l'immuno-oncologie : MSD vient d'annoncer l'approbation du remboursement de son immunothérapie pour les patientes atteintes d'un cancer du sein triple-négatif au stade avancé, en Belgique. C'est un progrès important pour ce groupe de patientes qui ne pouvaient jusqu’à présent compter que sur la chimiothérapie.
Le laboratoire pharmaceutique MSD, détenteur de l'un des programmes de recherche clinique les plus importants et les plus prometteurs au monde, a annoncé aujourd'hui, en Belgique, avoir reçu l'approbation pour le remboursement de son immunothérapie à l'attention des patientes atteintes d'un cancer du sein triple-négatif. Cette nouvelle redonne espoir à un groupe de patientes diagnostiquées avec un type de cancer du sein très agressif, et dont les perspectives d'avenir sont donc limitées.
Qu'est-ce que le cancer du sein triple-négatif ?
Le cancer du sein triple-négatif est une forme agressive de cancer du sein qui touche souvent de jeunes femmes. Ce type de cancer n'est pas hormonosensible car il ne possède pas de récepteurs (ni aux œstrogènes ni à la progestérone) et ne réagit donc pas à l'hormonothérapie qui bloque ces récepteurs. En outre, la tumeur n'est pas « HER2 positive », signe de la présence, dans les cellules cancéreuses, d'un autre récepteur qui peut être ciblé par les thérapies anti HER2. Ces deux facteurs combinés impliquent que ce type de cancer est très difficile à traiter. Dans un stade métastatique, en cas de dissémination dans d'autres organes, les cellules cancéreuses deviennent en outre plus vite résistantes à la chimiothérapie, et la guérison s'avère impossible. Pour ces patientes, il est donc urgent de développer, de nouvelles thérapies. 8,6 % des 12 000 cancers du sein recensés en Belgique sont des cancers du sein triple-négatifs précoces ou avancés. 1
Une nouvelle qui redonne espoir
L'annonce du remboursement est un grand pas en avant dans le traitement du cancer du sein triple-négatif au stade avancé. Après un long statu quo dans la recherche scientifique, voilà qui redonne espoir à ces femmes qui en manquaient cruellement dès l'instant où le diagnostic s'imposait à elles. Malheureusement, pour ce type de cancer, il n'est pas question de guérison. Les patientes ne peuvent compter que sur des thérapies, souvent expérimentales, qui leur permettent de garder le cancer sous contrôle et de survivre le plus longtemps possible. Par ailleurs, elles sont nombreuses à souffrir des effets collatéraux inévitables des traitements actuels. Le secteur médical attend depuis longtemps une solution pharmaceutique à l'énigme du cancer du sein triple-négatif, qui menace le pronostic vital.
Delphine Remy, auteure de Cancer ? Je gère ! et fondatrice du podcast Naître princesse, devenir guerrière, atteinte d'un cancer du sein, témoigne : "Avoir accès à un traitement innovant quand on est atteinte d'un cancer du sein triple-négatif est extraordinaire. Il y a trop de femmes jeunes qui ne survivent pas à ce type de cancer. Cela me brise le cœur de voir comme certaines femmes atteintes d'un cancer du sein triple-négatif sont maintenues en vie avec tous les moyens disponibles, dans l'espoir de tenir jusqu’à l'apparition d'un nouveau traitement capable de leur offrir un nouvel espoir. Je suis comblée de savoir qu'on a franchi un nouveau pas vers la victoire contre ce cancer du sein triple-négatif qui touche surtout les jeunes femmes.”
Retrouvez le témoignage vidéo de Delphine Remy ici et ici
Accroissement vérifié de l'espérance de vie dans le cas d'un cancer du sein triple-négatif métastatique s’il exprime fortement une « cible » dénommée PD-L1.
Une étude a déjà montré qu'en cas de cancer du sein triple-négatif, l'immunothérapie peut apporter un bénéfice. L'immunothérapie ne combat pas le cancer lui-même, mais elle aide le système immunitaire à le faire. Elle est essentiellement destinée à soutenir le travail des cellules T, des globules blancs susceptibles de reconnaitre les cellules cancéreuses et de les éliminer. La protéine PD-L1 exerce un frein sur l’action des cellules T, et ce frein est levé par le médicament d’immunothérapie de MSD.
L'étude KEYNOTE-355, qui est à l'origine du remboursement de l'immunothérapie pour le cancer du sein triple-négatif dans notre pays, concernait une population de 847 patientes, dans 209 villes réparties dans 29 pays, avec un cancer du sein triple-négatif, localement récidivant ou métastatique. Elles ont reçu volontairement un traitement de première ligne à base de chimiothérapie (le standard actuel) avec ou sans adjonction d’immunothérapie. L'étude a montré une augmentation de l'espérance de vie par rapport à un traitement uniquement à base de chimiothérapie. L'espérance de vie était effectivement meilleure chez les patients ayant reçu le traitement combiné avec l'immunothérapie, avec 27 % de risque de décès en moins par rapport aux patients ayant reçu la chimiothérapie seule². L'étude a démontré le rôle de l'immunothérapie de MSD en complément de la chimiothérapie pour le traitement de première ligne du cancer du sein triple-négatif avancé. Toutefois, les patientes ne peuvent bénéficier de l'immunothérapie que si l'expression de la protéine PD-L1 est suffisante dans la tumeur ce qui est le cas d’environ 4 patientes sur 10. Il s'agit d'un marqueur prédictif qui permet de prévoir la réponse de la patiente à cette immunothérapie. ³
« L’immunothérapie a révolutionné le pronostic de nombreux cancers (comme le mélanome, le cancer du poumon, etc…) et nous étions impatients d’enregistrer ses premiers succès dans le cancer du sein. C’est chose faite pour un sous-groupe des cancers du sein « triple négatif » métastatiques qui lorsqu’ils expriment fortement une « cible » appelée PD-L1, verront leurs chances de survie augmenter avec l’adjonction d’une immunothérapie à la chimiothérapie. L’étude KEYNOTE-355, avec son design statistique particulièrement robuste, vient renforcer une étude préexistante (IMpassion 130) qui avait suggéré un bénéfice de survie lorqu’on associe immunothérapie et chimiothérapie. Elle a l’avantage de montrer que ce bénéfice ne dépend pas du choix de la chimiothérapie (laissé libre dans l’étude KEYNOTE-355). Une nouvelle voie de progrès vers des thérapies ciblées s’ouvre pour un sous-type de cancer du sein particulièrement agressif » ajoute la Professeure Martine Piccart (ULB), directrice scientifique à l’Institut Jules Bordet.
1 Van Walle et al. Incidence of breast cancer subtypes in Belgium: a population-based study. BJMO - volume 14, issue 6, october 2020.
² Cortes et al. Pembrolizumab plus chemotherapy versus placebo plus chemotherapy for previously untreated locally recurrent inoperable or metastatic triple-negative breast cancer (KEYNOTE-355): a randomised, placebo-controlled, double-blind, phase 3 clinical trial. Lancet. 2020 Dec 5;396(10265):1817-1828
³ Rugo H.S., et al. KEYNOTE-355: Final results from a randomized, double-blind, phase 3 study of first-line pembrolizumab + chemotherapy versus placebo + chemotherapy for metastatic triple-negative breast cancer. Presented at ESMO 2021. abs LBA16.